Louis-Julien-Simon Héron
Âge : Né à Saint-Lunaire (Ille-et-Villaine), 46 ou 48 ans en thermidor.
Adresse : 3 rue (St-)Florentin, n°3
Métier : Marin
Fonction : Agent du Comité de sûreté générale
Sommaire
Origine et parcours de Héron
Louis-Julien-Simon Héron s’engage dans la marine en 1764 et y demeure durant une vingtaine d’années, jusqu’à la fin de la Guerre d’Amérique. Favorable aux ridées de la Révolution, il aurait participé au 14 juillet 1789 et abrité Marat lors de l’une de ses mises en accusation. Il se réclamera de son amitié et de celle de Dugommier dans un mémoire d’autodéfense postérieur aux événements de thermidor et affirmera avoir joué un rôle de premier plan lors de l’assaut des Tuileries le 10 août 1792(1)cf. J. TULARD, J.-F. FAYARD et A. FIERRO, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, Robert Laffont, 1987, pp. 875-876 ; Albert MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925, p. 480 ; Arne ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public : étude sur la Terreur, Oslo, J. Dybwad, 1930, p. 107 (+ note 5), d’après A. N., F7 4403, F7 4543 à 4743.
Héron agent du Comité de sûreté générale
Recruté par le Comité de sûreté générale en tant qu’agent officieux, Héron disposait de son propre local rue de la Loi (actuelle rue Richelieu)(2)cf. Michel EUDE, Le comité de sûreté générale de la Convention, in « L’Etat et sa police en France (1789-1914) », 1979, Droz, p. 19. Il aurait assisté Amar et Jagot dans le recrutement du nouveau personnel du Comité lors de l’épuration qui suivit le 20 germinal an II(3)cf. M. EUDE, Le comité de sûreté générale de la Convention, in « L’Etat et sa police en France (1789-1914) », 1979, Droz, p. 18 (+ note 7).
Ses collègues Dossonville et Sénard le décriront comme une créature de Robespierre(4)cf. A. ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public : étude sur la Terreur, Oslo, J. Dybwad, 1930, pp. 107-109 ; A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925 p. 480 d’après A. N., F7 4403. De fait, l’Incorruptible avait empêché son arrestation le 30 ventôse an II (20 avril 1794), demandée par Bourdon de l’Oise et Panis (ancien membre du Comité de sûreté générale) qui lui reprochaient de rançonner les citoyens auxquels il avait affaire(5)cf. R. COBB, Les témoignages de Rühl, AHRF 1955 p. 113 ; Réimpression de l’ancien Moniteur, t. XX, p. 6.
En floréal an II, le représentant à la Commune de la section des Tuileries, Follope, par ailleurs propriétaire du logement d’Héron, est envoyé à l’échafaud, amalgamé avec Madame Elisabeth(6)cf. Paul SAINTE-CLAIRE DEVILLE, La Commune de l’an II. Vie et mort d’une assemblée révolutionnaire, Paris, Plon, 1946, p. 164.
Implication dans l’affaire Catherine Théot
Suite à une dénonciation du 23 floréal (12 mai 1794) faite par Jaton et Pidoux, deux gendarmes de la 33e Division, le Comité de sûreté générale charge le jour même Héron et Sénard d’infiltrer les réunions de Catherine Théot, dont les prophéties attiraient de nombreux fidèles à son domicile de la rue de la Contrescarpe, et au besoin de procéder à des arrestations(7)cf. Michel EUDE, Points de vue sur l’Affaire Catherine Théot, AHRF 1969, pp. 608-609 (notes 8, 10), d’après A. N., F7 4775 27). L’arrêté du Comité de Sûreté, signé par Amar, Moyse Bayle, Du Barran, Jagot, Lacoste, Louis du Bas-Rhin et Voulland, n’est connu que par des références ou des allusions dans des procès-verbaux d’exécution (A. N., F7 4685 doss. Ducy, Arch. de la Préf. de Police, AA18, pièce 744).
Dom Gerle, ex-Constituant et l’un des principaux fidèles des séances de la Mère de Dieu, attestera pourtant qu’elles étaient fréquentées par de nouveaux arrivants dés le début du mois, dont certains auraient cherché à lui suggérer que Robespierre, Saint-Just, Couthon ou Barère étaient les rois annoncés par la prophétesse(8)cf. A. MATHIEZ, Catherine Théot et le mysticisme chrétien révolutionnaire, in La Révolution française, revue d’histoire moderne & contemporaine t. XL, 1901, pp. 499-500, d’après la Défense de Dom Gerle parue dans la Revue Retrospective n°11 (2e série), 1835. G. Lenôtre présentera par ailleurs l’un des dénonciateurs, Jaton, comme un agent d’Héron, ancien Suisse de Chateauvieux(9)cf. G. LENÔTRE, Robespierre et la « Mère de Dieu » — Le Mysticisme révolutionnaire, Paris, Perrin, 1926, chap. II (note 50).
Le 28 floréal, s’étant immiscé parmi les nouveaux frères à initier, Sénard et Héron procèdent à l’arrestation de Catherine Théot et ses complices(10)cf. A. MATHIEZ, Catherine Théot et le mysticisme chrétien révolutionnaire, in La Révolution Française, revue d’histoire moderne et contemporaine t. XL, 1901, p. 502; M. EUDE, Points de vue sur l’Affaire Catherine Théot, AHRF 1969, p. 609 (note 11), d’après le procès-verbal de Héron et Senard du 29 floréal (A. N., F7 4775 27), Mémoires de Sénard (…), Paris, Baudouin frères, 1824, pp. 173-190. Les interrogatoires de Dom Gerle, puis de Quesvremont Lamothe, ex-médecin habitant dans le même immeuble que Gerle, arrêté par eux le 1er prairial, mettent le Comité sur la piste des Orléans. Le 3 prairial, Héron et Sénard arrêtent le propriétaire du logement de la Contrescarpe(11)cf. A. MATHIEZ, Catherine Théot et le mysticisme chrétien révolutionnaire, in La Révolution Française, revue d’histoire moderne et contemporaine t. XL, 1901, p. 503 ; M. EUDE, Points de vue sur l’Affaire Catherine Théot, AHRF 1969, pp. 610-612.
Selon l’historien Arne Ording, les lettres que la prophétesse aurait adressé à l’Incorruptible — qui n’ont pas été retrouvé dans les archives mais que Héron confirma avoir vu dans son mémoire d’autodéfense — auraient été fabriquées par ce dernier ou Sénard(12)cf. A. ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public : étude sur la Terreur, p. 133 ; A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925, p. 481. S’il ne dirige pas toutes les arrestations (c’est un autre agent du comité, J.B. Blache, qui arrête le 22 prairial la marquise de Chastenoye), il signe le 2 thermidor l’ordre d’arrestation de Pontard, Miroudot, Gros, Saint-Martin, et des femmes Pocheloche et Potu, mais seuls Miroudot, Gros et la citoyenne Potu sont arrêtés entre le 3 et le 5 thermidor(13)cf. M. EUDE, Points de vue sur l’Affaire Catherine Théot, AHRF 1969, pp. 611, 614 (+ notes 17, 32, 33).
Evénements de thermidor et fin de carrière
Le 9 thermidor, s’étant présenté accompagné de Pillé et de Rigogne à l’état-major d’Hanriot afin de l’arrêter, Héron déclarera avoir eu beaucoup de mal à parvenir à lui étant donné une forte affluence d’hommes en armes stationnés devant le secrétariat général. Y étant finalement parvenu, il aurait été capturé aux alentours de 15 h. après avoir fait connaître les motifs de sa venue. Hanriot lui aurait fait croire qu’il allait le tuer, avant de se raviser et de l’envoyer dans la prison militaire rue du Bouloi avec ses adjoints, bientôt rejoints par le citoyen Paté qui de son côté été avait été chargé d’arrêter Payan. Tous sont libérés sur ordre du Comité de sûreté générale environ trois heures plus tard(14)cf. P. SAINTE-CLAIRE DEVILLE, La Commune de l’an II. Vie et mort d’une assemblée révolutionnaire, pp. 203-204, d’après A. N., AF II 47, pl. 368 pièce 29, et F7 4743 ; A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925 pp. 481-483 (+ note 1) mais à la suite de nouvelles dénonciations de Bourdon de l’Oise le 15 thermidor à la Convention, Héron est à nouveau arrêté le 19 du même mois(15)cf. A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925 pp. 480, 483 ; A. ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public, p. 108 (note 1).
Son ancien collègue Sénard livrera à son encontre un témoignage accablant lors du procès de Fouquier-Tinville, mentionnant entre autres qu’il lui aurait vainement demandé de faire figurer le nom de son épouse dans un complot aristocratique(16)cf. A. ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public, p. 108 (+ note 6), d’après P.-J.-B. BUCHEZ & P.-C. ROUX, Histoire parlementaire de la Révolution, t. XXXIV, p. 308. Si Bourdon de l’Oise n’obtient pas son exécution immédiate le 1er prairial an III (20 mai 1795), Héron est traduit le 5 prairial au tribunal criminel d’Eure-et-Loir en même temps que Pache, Bouchotte, Audouin, d’Aubigny, Hassenfratz, Clémence et Marchand. Tous sont remis en liberté sans jugement à la faveur de l’amnistie prononcée par la Convention en brumaire an IV juste avant sa séparation. Héron décède l’année suivante à Versailles(17)cf. A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925 p. 483 ; J. TULARD, J.-F. FAYARD et A. FIERRO, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, Robert Laffont, 1987, p. 876.
Réferences
↑1 | cf. J. TULARD, J.-F. FAYARD et A. FIERRO, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, Robert Laffont, 1987, pp. 875-876 ; Albert MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925, p. 480 ; Arne ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public : étude sur la Terreur, Oslo, J. Dybwad, 1930, p. 107 (+ note 5), d’après A. N., F7 4403, F7 4543 à 4743 |
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↑2 | cf. Michel EUDE, Le comité de sûreté générale de la Convention, in « L’Etat et sa police en France (1789-1914) », 1979, Droz, p. 19 |
↑3 | cf. M. EUDE, Le comité de sûreté générale de la Convention, in « L’Etat et sa police en France (1789-1914) », 1979, Droz, p. 18 (+ note 7) |
↑4 | cf. A. ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public : étude sur la Terreur, Oslo, J. Dybwad, 1930, pp. 107-109 ; A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925 p. 480 d’après A. N., F7 4403 |
↑5 | cf. R. COBB, Les témoignages de Rühl, AHRF 1955 p. 113 ; Réimpression de l’ancien Moniteur, t. XX, p. 6 |
↑6 | cf. Paul SAINTE-CLAIRE DEVILLE, La Commune de l’an II. Vie et mort d’une assemblée révolutionnaire, Paris, Plon, 1946, p. 164 |
↑7 | cf. Michel EUDE, Points de vue sur l’Affaire Catherine Théot, AHRF 1969, pp. 608-609 (notes 8, 10), d’après A. N., F7 4775 27). L’arrêté du Comité de Sûreté, signé par Amar, Moyse Bayle, Du Barran, Jagot, Lacoste, Louis du Bas-Rhin et Voulland, n’est connu que par des références ou des allusions dans des procès-verbaux d’exécution (A. N., F7 4685 doss. Ducy, Arch. de la Préf. de Police, AA18, pièce 744) |
↑8 | cf. A. MATHIEZ, Catherine Théot et le mysticisme chrétien révolutionnaire, in La Révolution française, revue d’histoire moderne & contemporaine t. XL, 1901, pp. 499-500, d’après la Défense de Dom Gerle parue dans la Revue Retrospective n°11 (2e série), 1835 |
↑9 | cf. G. LENÔTRE, Robespierre et la « Mère de Dieu » — Le Mysticisme révolutionnaire, Paris, Perrin, 1926, chap. II (note 50) |
↑10 | cf. A. MATHIEZ, Catherine Théot et le mysticisme chrétien révolutionnaire, in La Révolution Française, revue d’histoire moderne et contemporaine t. XL, 1901, p. 502; M. EUDE, Points de vue sur l’Affaire Catherine Théot, AHRF 1969, p. 609 (note 11), d’après le procès-verbal de Héron et Senard du 29 floréal (A. N., F7 4775 27), Mémoires de Sénard (…), Paris, Baudouin frères, 1824, pp. 173-190 |
↑11 | cf. A. MATHIEZ, Catherine Théot et le mysticisme chrétien révolutionnaire, in La Révolution Française, revue d’histoire moderne et contemporaine t. XL, 1901, p. 503 ; M. EUDE, Points de vue sur l’Affaire Catherine Théot, AHRF 1969, pp. 610-612 |
↑12 | cf. A. ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public : étude sur la Terreur, p. 133 ; A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925, p. 481 |
↑13 | cf. M. EUDE, Points de vue sur l’Affaire Catherine Théot, AHRF 1969, pp. 611, 614 (+ notes 17, 32, 33) |
↑14 | cf. P. SAINTE-CLAIRE DEVILLE, La Commune de l’an II. Vie et mort d’une assemblée révolutionnaire, pp. 203-204, d’après A. N., AF II 47, pl. 368 pièce 29, et F7 4743 ; A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925 pp. 481-483 (+ note 1) |
↑15 | cf. A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925 pp. 480, 483 ; A. ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public, p. 108 (note 1) |
↑16 | cf. A. ORDING, Le Bureau de police du Comité de salut public, p. 108 (+ note 6), d’après P.-J.-B. BUCHEZ & P.-C. ROUX, Histoire parlementaire de la Révolution, t. XXXIV, p. 308 |
↑17 | cf. A. MATHIEZ, La vie de Héron racontée par lui-même, AHRF 1925 p. 483 ; J. TULARD, J.-F. FAYARD et A. FIERRO, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, Robert Laffont, 1987, p. 876 |