PERREGAUX

Jean-Frédéric Perregaux

Age : 49 ans en thermidor.

Natif de Neufchâtel, principauté suisse détenue par le roi de Prusse.

Adresse : 5 rue Mirabeau (section des Piques)

Métier : Banquier

Fonction(s) : responsable de l’approvisionnement de matériel et de marchandises auprès des pays neutres

Sommaire

Protections de Perregaux en 1793

Perregaux(1)Pour sa généalogie, voir : http://www.genea-bdf.org/BasesDonnees/genealogies/perregaux.htm serait resté durant toute la Révolution en contact avec Lord Auckland, ministre en France de 1785 à 1787 devenu ensuite un adversaire de la République(2)cf. Raymond GUYOT, Le Directoire et la paix de l’Europe, p. 272, note 2, d’après la collection d’autographes Morrison, t. II (lre série) et t. III (2e série), in Annales révolutionnaires 1920, Albert MATHIEZ, Encore le banquier Perregaux, pp. 240-241.

Durant l’été 1793, le soupçon s’appesantit à l’encontre des banquiers mais aussi des étrangers, y compris quand il s’agit de ressortissants de pays neutres. Perregaux sortit systématiquement disculpé de toutes les procédures qui pouvaient l’inquiéter, soi de par son état et sa profession, soi à titre individuel.

Dénonciation contre Perregaux classée durant l’été

Durant l’été 1793, le soupçon s’appesantit à l’encontre des banquiers mais aussi des étrangers, y compris quand il s’agit de ressortissants de pays neutres. Perregaux sortit systématiquement disculpé de toutes les procédures qui pouvaient l’inquiéter, soi de par son état et sa profession, soi à titre individuel.

Une semaine après le décret du 1er août 1793 qui frappait d’arrestation tous les ressortissants de pays ennemis, Perregaux fut dénoncé par Coppin, curé de Provins, comme ayant soutenu financièrement des émigrés. Le Comité de sûreté générale, qui statua en faveur du banquier suisse, mentionne sans plus de précisions qu’il avait déjà été arrêté auparavant(3)Mathiez n’a pas retrouvé de trace de cette arrestation antérieure. Cf. A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, Annales révolutionnaires 1919, pp. 242-243..

Quand l’apposition de scellés chez tous les banquiers étrangers fut décidée, Perregaux put garder provisoirement à demeure les cartons contenant les traites tirées sur sa banque par des négociants de pays ennemis. Pour se mettre en conformité avec un nouveau décret du 10 octobre 1793 qui enjoignait aux détenteurs d’avoirs étrangers d’en faire la déclaration à se section, il remit deux jours plus tard un état de ses comptes excédentaire (il devait moins d’argent aux anglais que ceux-ci ne lui en devaient)(4)cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, pp. 246-247.

Seconde arrestation durant l’hiver

Le 24 frimaire an II (14 décembre 1793), le Comité de Sûreté Générale doit pourtant ordonner son arrestation après que le duc de Châtelet, condamné à mort pour crime d’émigration, aurait voulu acheter son évasion auprès de ses geôliers, en leur signant un chèque de 100.000 livres sur la banque Perrégaux, où serait cachée une partie de sa fortune. Absent au moment des faits, Perregaux revient aussitôt se présenter devant le Comité de Salut Public, qui délègue l’examen de son cas à Cambon, Moyse Bayle et Johannot. Le 3 nivôse an II, Cambon le blanchit entièrement à la Convention, qui décrète sans discussion sa libération(5)cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, p. 249 ; G. WALTER, Maximilien de Robespierre, Gallimard, édition de 1989, p. 445.

Le 19 nivôse, il fait encore l’objet d’une dénonciation, établissant qu’il eut recours à des services de maçonneries (lesquels confirmeront) pour se faire installer des caches destinées à abriter les fonds de certains clients. La perquisition effectuée trois jours plus tard les comités révolutionnaires des sections du Muséum et des Piques ne donna rien, les cachettes étant dépourvues d’éléments compromettants(6)cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, pp. 250-251.

Missionné en Suisse par le Comité de Salut Public

La République ayant besoin de s’approvisionner en matériel militaire et subsistances auprès des pays neutres (essentiellement les Etats Unis et la Suisse), le Comité de salut public  décida de réquisitionner les créances détenues par les banquiers de France dans ces pays. Avec la Commission des subsistances, le Comité de sûreté générale et le Comité des Finances, il installe le 9 nivôse an II (29 décembre 1793) Perregaux à la tête d’une commission formée de dix banquiers et agents de change. Elle est chargée de recenser et de collecter ces créances pour le Trésor Public, sous l’autorité de Cambon, Dupuis, Moyse Bayle, Du Barran et Robert Lindet. Il fut établi que les banquiers souscripteurs seraient soustraits de la surveillance des comités révolutionnaires de sections pour être placés sous l’autorité directe du Comité de sûreté générale(7)cf. Annales révolutionnaires 1920, A. MATHIEZ, Encore le banquier Perregaux, pp. 238-239.

Fin pluviôse, Perregaux remettait à Robert Lindet la liste des banquiers souscripteurs et celle des missionnaires envoyés à l’étranger. Proche de l’ambassadeur français à Berne François de Barthelemy(8)cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, pp. 250-252, citant KAULEK, Papiers de Barthélémy, t. III, p. 407 (futur membre du Directoire dont il sera exclu pour ses sympathies royalistes après le 18 fructidor an V), il se réserve pour lui-même la mission pour la Suisse, point central de la correspondance internationale(9)cf. Annales révolutionnaires 1920, A. MATHIEZ, Encore le banquier Perregaux, p. 240.

Nouvelle compromission de Perregaux à la chute de Danton

Perregaux était déjà en Suisse quand, à la suite de l’arrestation de Danton du 10 germinal an II, on découvrit dans sa correspondance une lettre établissant qu’un agent du Foreign Office avait ouvert un crédit dans l’établissement du banquier neufchâtelois. D’importantes sommes devaient être remises à différents individus, désignés par leurs initiales, pour pousser les Jacobins au « paroxysme de la fureur ». La lettre ne fut pas versée aux pièces du procès Danton, peut être par la volonté du Comité de salut public de préserver son partenariat avec le banquier. Sa mission ne fut pas officiellement suspendue, et il demeura en contact avec Barthélémy, l’instruisant encore de la situation à Neufchâtel au début du mois de juillet 1794(10)cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, p. 252. Après thermidor, rentré de sa mission à Bâle, Perregaux communiqua à Louis Monneron, de la Commission du commerce et des approvisionnements, l’offre d’un spéculateur russe proposant 10 chargements en suif et 7 en chanvre, contre 8 millions de livres sterling payables à Bâle en liquide. L’affaire ne se serait finalement pas faite(11)cf. AHRF 1966 R. COBB, Perregaux et une proposition d’échanges commerciaux franco-russes en Brumaire an III, pp. 100-103.

Hostilité de Robespierre et de ses proches ?

Le réseau d’Antraigues diffusa à l’étranger à partir d’avril 1794 un rapport prétendument écrit par Saint-Just, destiné aux autres membres du Comité de salut public et daté du 21 ventôse an II(12)cf. AHRF 1957, R. de GRANDSAIGNES, Enquête sur les bulletins de Dropmore, pp. 232-234(+notes 1-5-6-8). Sont visées l’ensemble des dépenses faites dans les pays neutres, dont les dépenses secrètes, mais surtout de considérables achats de vivres et d’équipements destinés aux forces armées(13)cf. AHRF 1957, R. de GRANDSAIGNES, Enquête sur les bulletins de Dropmore, p. 235. Jusqu’à la chute des Robespierristes, les diplomates visés restèrent prudents à réagir ou pour se prononcer sur l’authenticité du document (Barthélémy attendit le 12 thermidor pour en parler)(14)cf. AHRF 1957, R. de GRANDSAIGNES, Enquête sur les bulletins de Dropmore, p. 234(+note 9), citant Aff. étr. Suisse 448.

Robespierre vise-t-il Perregaux et sa mission dans son discours du 8 thermidor, quand il adresse cette critique sur la politique étrangère du Comité : « Presque tous les agents employés chez les puissances étrangères, décriés par leur incivisme, ont trahi ouvertement la République avec une audace impunie jusqu’à ce jour »(15)cf. Œuvres complètes de Maximilien de Robespierre, t. 10, p. 568 ?

Réferences

Réferences
1 Pour sa généalogie, voir : http://www.genea-bdf.org/BasesDonnees/genealogies/perregaux.htm
2 cf. Raymond GUYOT, Le Directoire et la paix de l’Europe, p. 272, note 2, d’après la collection d’autographes Morrison, t. II (lre série) et t. III (2e série), in Annales révolutionnaires 1920, Albert MATHIEZ, Encore le banquier Perregaux, pp. 240-241
3 Mathiez n’a pas retrouvé de trace de cette arrestation antérieure. Cf. A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, Annales révolutionnaires 1919, pp. 242-243.
4 cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, pp. 246-247
5 cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, p. 249 ; G. WALTER, Maximilien de Robespierre, Gallimard, édition de 1989, p. 445
6 cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, pp. 250-251
7 cf. Annales révolutionnaires 1920, A. MATHIEZ, Encore le banquier Perregaux, pp. 238-239
8 cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, pp. 250-252, citant KAULEK, Papiers de Barthélémy, t. III, p. 407
9 cf. Annales révolutionnaires 1920, A. MATHIEZ, Encore le banquier Perregaux, p. 240
10 cf. Annales révolutionnaires 1919, A. MATHIEZ, Le banquier Perregaux, p. 252
11 cf. AHRF 1966 R. COBB, Perregaux et une proposition d’échanges commerciaux franco-russes en Brumaire an III, pp. 100-103
12 cf. AHRF 1957, R. de GRANDSAIGNES, Enquête sur les bulletins de Dropmore, pp. 232-234(+notes 1-5-6-8)
13 cf. AHRF 1957, R. de GRANDSAIGNES, Enquête sur les bulletins de Dropmore, p. 235
14 cf. AHRF 1957, R. de GRANDSAIGNES, Enquête sur les bulletins de Dropmore, p. 234(+note 9), citant Aff. étr. Suisse 448
15 cf. Œuvres complètes de Maximilien de Robespierre, t. 10, p. 568
Share

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *